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Université de Lausanne        
    Dies 2002:Allocution de M. Nicolas Gachoud, représentant de la Fédération des associations d'étudiants (FAE)

 

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Le discours remis à la presse ne correspond pas au discours prononcé que nous reproduisons ci-dessous:

Mesdames et Messieurs
L’art du coup d’Etat est facile, tout comme la critique. C’est pourquoi la Fédération des Associations d’Etudiants en introduit l’usage pour son discours de cette année.
On nous opposera que notre Université n’avait pas encore besoin de cela pour achever sa réputation, ainsi que la nôtre. Rassurez-vous donc: ce coup d’Etat sera bref, pacifique et sans dommage pour la continuité des institutions.
Remplacer le Rectorat actuel par un groupuscule étudiant dans le cadre d’un coup d’état nous paraît tout à fait à propos: nous laissons en effet le mot «révolution» à nos amis de l’Ecole Polytechnique, qui en auront bien besoin pour faire tomber les baronnies et autres serments d’allégeance si caractéristique d’un régime féodal.
À l’inverse, n’allez pas croire qu’à nos yeux l’Université lausannoise soit une république bananière comme une autre, dont l’exécutif tomberait à la première mutinerie. Bien qu’elle soit composée d’un grand nombre d’aventuriers, l’inertie qui régit son évolution suffît à décourager tout aspirant Bob Denard à tenter de s’emparer de notre vénérable institution.

Un gouvernement provisoire a donc été démocratiquement constitué. Ce grâce à un point de l’ordre du jour surprise lors d’une séance de décisions consultative du Sénat à la mi-août: les initiés reconnaîtront dans ces méthodes rien d’autre que celles de nos prédécesseurs, qui nous succéderont à nouveau dans quelques minutes.
C’est donc dans la légalité la plus loufoque qui caractérise si bien le fonctionnement de cette Université que nous allons vous soumettre notre programme de redressement académique:
Nous voulons que l’Université de Lausanne retrouve sa dignité et que ses autorités puissent tenir leur conférence de presse la tête haute. Il ne sera par exemple plus question d’insulter des chercheurs de pharmacie pour sauver un projet calamiteux, ou de mentir publiquement pour une animalerie en trop, ou encore de suggérer des projets de constructions dantesques là où le budget actuel ne garantit pas l’eau chaude.

Nous dénoncerons avec toute la vigueur nécessaire l’inconstance de l’EPFL dans le cadre du projet triangulaire. Nous démontrerons dans les actes notre volonté de nous distancer d’une école qui, si elle a bien un chef, n’a pas de tête.
Nous proposerons une nouvelle méthode de gestion financière de l’Université: justifiés ou pas, 50 millions de francs ne peuvent être ainsi laissés en réserve sans discréditer un peu plus une institution célèbre pour son opacité financière. Si l’Université a trop d’argent, autant le reverser dans des domaines bien plus urgents que sont la petite enfance, l’aide aux réfugiés et la culture.
- Nous ferons nôtre la défense de la vie étudiante: l’Université ne reprendra ses cours que quand tous les étudiants bénéficieront d’un logement décent et de moyens suffisants pour vivre et étudier! Des conditions d’études et d’encadrement de qualité constituent la seule direction que devrait aujourd’hui suivre les autorités: elles seules garantiront à long terme des chercheurs de qualité et la continuité de l’Université publique et libre.
Le Centre Intégratif de Génomique sera abandonné et nous rendrons leur liberté aux souris pour laisser la place à une colonie de lemmings. Nous serons ainsi mieux à même de saisir les principes régissant les décisions du Rectorat «canal historique» de ces dernières années, et donc de trouver des solutions pour faire cesser les pulsions suicidaires de nos autorités.
Un salaire étudiant sera mis sur pied: nous prenons ainsi au mot ceux qui veulent créer un étudiant professionnel, corvéable à merci et standardisé au même titre que ses études. Les autorités fédérales se rendront alors compte du coût effectif d’une politique de formation populaire et ouverte à tous. D’ailleurs, un coup d’Etat de l’Union Nationale des Etudiants est à l’étude, mais les perspectives qu’offre l’exercice du pouvoir à ce niveau en font réfléchir plus d’un.

Notre horizon dépassera 2008: à l’inverse de notre Secrétaire d’Etat à la recherche du temps perdu, nous estimons que l’Université mérite de survivre aux mises en demeure des apprentis sorcier de l’économie. Premières mesures, les mandats privés de professeur seront déduis de leurs années de congés académiques, et les gains seront entièrement reversés à la Fondation «Touche Pas à Mon Assistant».
Les brevets et autres découvertes découlant de l’activité de nos chercheurs relèveront du domaine public et seront accessibles à tous. A l’inverse une fois de plus de notre remuant voisin, l’argent public ne sera pas destiné à financer la recherche à des fins commerciales et privées. Nos mesures auront par ailleurs un effet rétroactif, puisque ceux qui aujourd’hui s’en mettent plein les poches grâce à des travaux résultants de recherches publiques seront mis à l’amende à hauteur égale du profit dégagé.

D’autre part, le Sénat de l’Université de Lausanne ne sera plus le pot de chambre - l’expression chambre d’enregistrement étant un peu faible -du Rectorat. Il bénéficiera désormais d’une représentation étudiante proportionnelle à sa taille réelle et s’entretiendra de tous les sujets financiers et législatifs sans se voir court-circuiter par son exécutif.
Nous ne nous lancerons pas dans le cinéma: pas de scénario Dorigny, pas de coproduction douteuse, ni de cadrage flou, et encore moins de réalisation ou de montage insuffisants. Nous éviterons ainsi autant de navets douloureux pour la crédibilité de notre institution.
Enfin, nous nous engageons durant ces quelques minutes de prise de pouvoir à ne pas rédiger notre propre rapport sur l’avenir de l’Université: les deux dernières tentatives en ont déjà assez fait douté sans que nous y ajoutions!
Nous allons maintenant remettre à nouveau le pouvoir au Rectorat «régulier». Si cette expérience vous a choqué, sachez qu’elle est à cent lieues de ce que la communauté universitaire peut ressentir du cirque permanent mené par quelques uns pour s’arroger qui quelques fonds supplémentaires, qui un peu de pouvoir et, toujours et encore, plus de prestige.
Le Dies Academicus est le niveau zéro de l'Université ouverte, libre et critique que tant d’entre nous rêve. Le fait que quelques étudiants puissent y prendre la parole, et a fortiori y contester, ne participe pas du remède, mais au mieux que du prolongement de la maladie. C’est bien par une attitude nouvelle de tous - personnel administratif, professeurs, étudiants, chercheurs - que l’Université échappera à son destin de faire-valoir de quelques egos mal maîtrisés.

 

   

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