Quels impacts les recherches neuroscientifiques liées au genre ou au sexe ont-elles dans la société ? C'est la thématique abordée par « NeuroGenderings III : The 1st international Dissensus Conference on brain and gender », du 8 au 10 mai prochain à l'Aula de l'IDHEAP.
Le réseau NeuroGenderings a vu le jour en 2010, avec une première rencontre organisées à Uppsala en Suède, où des experts des sciences sociales et des neurosciences se sont réunis pour initier une réflexion à propos des études liées au genre sur le cerveau.
« L'idée est de faire émerger une discussion politique autour de ces connaissances, à l'heure où les neurosciences prennent toujours plus d'importance dans la société », comme l'explique la doctorante en histoire Christel Gumy, qui a participé à l'organisation de NeuroGenderings III au côté de Cynthia Kraus, maître d'enseignement et de recherche à la faculté des sciences sociales et politiques.
Cinq sexes différents
Parmi les conférencières, on compte notamment la présence d'Anne Fausto-Sterling, biologiste, spécialiste en étude genre et auteure de nombreux ouvrages remarqués, dont Sexing the body. Gender Politics and the Construction of Sexuality, en 2000 (paru en français en 2012 sous le titre Corps en tous genres. La dualité des sexes à l'épreuve de la science). Dans ce livre devenu classique, Anne Fausto-Sterling démontre que la science n'est pas neutre mais au contraire toujours située. La biologiste est également célèbre pour avoir proposé un système à cinq sexes différents, à l'encontre des catégories convenues hommes/femmes. Dans le cadre de NeuroGenderings, elle évoquera la manière dont les bébés acquièrent leur genre.
Dans un autre registre, les chercheuses françaises Odile Fillod et Catherine Vidal analyseront la position du Vatican quant à la notion de genre, à travers le Lexique publié en 2003 par le Conseil pontifical pour la famille. Les chercheuses proposeront un point de vue critique de l'ouvrage, élaboré selon elles à partir de théories obsolètes.
Un cerveau adolescent ?
Au cours du colloque, Christel Gumy de son côté présentera sa thèse menée actuellement sur une histoire du cerveau adolescent, qui s'inscrit également dans le champ des études genre. Dans les années 90, aux Etats-Unis, à une époque de forte préoccupation politique et sociale envers la délinquance juvénile, une théorie a émergé selon laquelle le cerveau adolescent serait naturellement impulsif et enclin à prendre des risques. Cette théorie s'appuie sur des études par imagerie cérébrale qui ont à la même époque mis en évidence le fait que le cerveau continuait à maturer jusqu'à l'âge de 25 ans. « Pourtant, dans les années 1980, déjà des scientifiques à Lausanne avaient identifié ces spécificités développementales, explique Christel Gumy. Mais leurs travaux en histologie n'ont pas abouti à une explication cérébrale des comportements désignés aujourd'hui typiques de l'adolescence, les comportements de prise de risque ». Pourquoi les révéler à une certaine époque plutôt qu'à une autre?
Ouvertes au grand public, les différentes conférences de NeuroGenderings III permettront d'apporter un nouvel éclairage, par le biais du genre, sur les rapports entre neurosciences et société.