La résistance de certaines tumeurs à la chimiothérapie, entraînant la rechute des patients, a été jusqu'à présent expliquée par l'apparition de mutations génétiques dans les cellules tumorales, leur permettant ainsi d'échapper au vieillissement cellulaire induit par le traitement. L'équipe du Dr Andrea Alimonti, Privat-docent à la FBM au Service d'oncologie médicale du CHUV et chercheur à l'Institut de recherche en oncologie de Bellinzone, dévoile un nouveau mécanisme par lequel les cellules cancéreuses résistent à la chimiothérapie. Les résultats sont publiés dans l'édition de septembre 2014 de la revue «Nature». Retour sur cette découverte étonnante.
Les chercheurs en oncologie tentent, depuis une dizaine d'années, de comprendre comment certaines cellules tumorales échappent au vieillissement (ou sénescence) cellulaire induit par la chimiothérapie. Ce mécanisme, par lequel les cellules qui ont subi un stress oncogénique sortent du cycle cellulaire, contribue à prévenir la prolifération anarchique des cellules tumorales et à inhiber le développement des cancers. Selon le dogme scientifique existant, l'apparition de nouvelles mutations génétiques dans les cellules cancéreuses leur permettrait de devenir résistantes aux drogues chimiothérapeutiques.
Vers de nouvelles voies thérapeutiques
Dans l'étude parue dans la revue Nature, les Dr Diletta Di Mitri et Alberto Toso de l'équipe du Dr Andrea Alimonti de l'Institut de recherche en oncologie de Bellinzone mettent en lumière un nouveau mécanisme par lequel les cellules tumorales échappent à la sénescence cellulaire. En collaboration avec des équipes suisse, espagnole et américaine, les chercheurs ont démontré que les cellules cancéreuses interagissent avec des cellules du système immunitaire qui infiltrent les tumeurs, les cellules myéloïdes. Celles-ci libèrent une protéine qui inhibe la cascade induite par les gènes suppresseurs de tumeurs et les drogues chimiothérapeutiques, empêchant ainsi l'entrée en sénescence des cellules cancéreuses, qui continuent alors à proliférer. Fait intéressant: lorsque les scientifiques bloquent le recrutement des cellules myéloïdes, la senescence cellulaire est alors de nouveau induite par la chimiothérapie et les tumeurs répondent parfaitement au traitement.
«Cette découverte démontre que les cellules tumorales sont capables d'éviter le processus de sénescence en absence de mutations génétiques et laisse entrevoir de nouvelles voies thérapeutiques dans le traitement des cancers chez les patients soumis à la chimiothérapie», résume le Dr Andrea Alimonti.