L'Ecole de français langue étrangère (EFLE) de l'Université de Lausanne a le plaisir de recevoir Madame Annette Boudreau, professeure à l'Université de Moncton (Nouveau-Brunswick, Canada) pour une journée de travail autour de la langue et de la légitimité.
S'interrogeant depuis de nombreuses années sur « ce que veut dire parler français en contexte minoritaire » en Amérique du nord, Annette Boudreau s'intéresse à l'influence des idéologies linguistiques véhiculées par les discours médiatiques et institutionnels sur les représentations que les locuteurs francophones minoritaires se font de leur langue, mais aussi sur leurs comportements langagiers et sur les jeux de pouvoir liés à la possession d'un capital linguistique légitime. Lors de sa présentation, elle retracera son parcours et présentera les grandes lignes de son nouvel ouvrage, A l'ombre de la langue légitime. L'Acadie dans la francophonie (Paris : Classiques Garnier).
Dans le contexte de l'appropriation de la L2, les idéologies langagières et les représentations individuelles - notamment sur la langue de l'autre, sur la langue étrangère ou encore sur l'apprentissage des langues - structurent la construction d'un sentiment de légitimité en termes de droit que la personne s'accorde et/ou se voit accorder à agir socialement dans le nouveau pays et dans la langue.
En ce sens, Paula Ristea interrogera la manière dont plusieurs étudiant.e.s apprenant le français en contexte homoglotte et universitaire se situent par rapport aux différentes pratiques de littératie qu'ils/elles mettent en place, en les considérant comme plus ou moins légitimes et adéquates en comparaison avec celles d'autres scripteurs, notamment francophones, ou avec leurs propres pratiques de littératie dans d'autres langues ou contextes socioculturels.
Au niveau de la formation des enseignants de langues, Thérèse Jeanneret et Delphine Etienne-Tomasini discuteront le rôle des langues de la classe dans la construction de la légitimité ou de l'illégitimité de l'enseignant-e-stagiaire en s'appuyant sur des entretiens autoréflexifs. Elles s'intéresseront plus particulièrement à un stage professionnel que les enseignant-e-s stagiaires réalisent en allemand langue seconde ou en français langue seconde: l' « épreuve » de la langue qu'ils affrontent permet de mettre en perspective, au travers du prisme des langues, leur agir professionnel et social en classe et la perception qu'ils/elles se font de leur (il)légitimité professionnelle.
Intéressée par l'appropriation d'une nouvelle langue par des adultes en contexte homoglotte, Anne-Christel Zeiter se penchera sur l'articulation entre les rapports de pouvoir inhérents à l'entrée dans un nouveau contexte linguistique et social et l'interprétation qu'en fait la personne. Considérant que de cette articulation dépend la construction d'un sentiment de légitimité a priori favorable à l'appropriation langagière et donc à un accès toujours plus grand à des agirs sociaux variés, elle problématisera les apports et limites d'une focalisation sur la subjectivité dans le jeu du pouvoir qui entoure l'entrée dans la langue.
Dans le contexte de la littérature enfin, Alain Ausoni s'intéressera au positionnement des écrivains translingues dans le champ de la littérature francophone. Il proposera de voir l'écriture translingue de soi comme le lieu privilégié d'une épreuve de l'expérience de la pratique littéraire dans une langue étrangère et d'une mise en jeu de la légitimité d'une telle pratique.
En fonction de la spécificité de leur champ, de leurs problématiques et de leurs données, les différents intervenants présenteront les liens qu'ils perçoivent entre l'usage de la langue et la question de la légitimité, en termes d'influence sur les pratiques sociales. A l'issue de ces contributions, Alexandre Duchêne, professeur à l'Institut de Plurilinguisme de l'Université de Fribourg, proposera une synthèse destinée à ouvrir une discussion plus libre et approfondie des points soulevés par les différents intervenants en lien avec la démarche proposée par Annette Boudreau dans son nouvel ouvrage.
Cette journée est ouverte à toute personne intéressée.