Recherches doctorales et postdoctorales

Elias Arduini, assistant-doctorant

Quels destins des liens fraternels en contexte de catastrophe sociale ? Une étude qualitative d’orientation psychanalytique

Elias ARDUINI, assistant-doctorant

Directeur de thèse : Prof. Muriel Katz

Aujourd’hui, la Colombie est désignée à l’échelle mondiale comme l’un des pays dénombrant le plus grand nombre de disparitions forcées de personnes. La disparition forcée de personnes est définie au niveau international par l’article 2 de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées comme suit :

« Aux fins de la présente Convention, on entend par « disparition forcée » l’'arrestation, la détention, l'enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l'État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l'autorisation, l'appui ou l'acquiescement de l'État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la protection de la loi. »

La littérature scientifique décrit la disparition forcée de personnes comme une forme de crime politique singulier et complexe qui agit à plusieurs niveaux. La disparition du corps de la victime implique la privation de liberté, d’une part et l’absence de traces, d’informations officielles, de reconnaissance sociale et politique pour la victime comme pour ses proches. Mais un tel crime politique prive également les proches de rites funéraires.

Par ailleurs, étant donné ces différentes caractéristiques et l’impunité qui entoure la disparition forcée de personnes, le processus de deuil est fortement mis à mal pour les proches du disparu. À un niveau plus concret, la disparition d’un membre de la famille peut avoir des répercussions sur la famille, la répartition des rôles par exemple.

Mais qu’en est-il des répercussions de la disparition forcée d’un proche sur ses frères et sœurs ? Comment le groupe fratrie fait-il face à ce drame ? Qu’advient-il des liens entre les différents membres du groupe-fratrie ? Dans quelle mesure le lien fraternel peut-il être étayant, soutenant, pendant et dans l’après-coup de ce type d’événements traumatogènes ? Quel est le destin des liens fraternels dans le contexte d’une catastrophe sociale qui entraîne la disparition forcée d’un proche ?

Quelles sont par ailleurs les réactions de chacun des frères et sœurs à plusieurs niveaux : familial, groupal, subjectif, émotionnel, social, économique ? Quelles sont les stratégies personnelles développées pour faire face à un tel drame ?

La présente étude vise à éclairer les répercussions de la disparition forcée d’un proche sur le sujet et sur la fratrie à plusieurs niveaux : deuils, traumas, remaniements des rôles, de l’identité, de l’organisation familiale. Enfin, il est espéré que ces observations permettent des pistes de réflexions et suggestions quant à la prise en charge thérapeutique des proches de personnes disparues.

Au travers de trois entretiens ouverts, semi-directifs, et audio-enregistrés ; ainsi qu’un questionnaire biographique et d’une Libre Réalisation de l’Arbre Généalogique, il s’agira de saisir les points de vue et vécus des frères et sœurs, et de les mettre ensemble en perspective.

Gaia Barbieri, première assistante

Des corps sans nom, entre apparition et disparition. Comment accueillir les naufragés de la migration?

Gaia Barbieri, première assistante

Directeur de thèse : Prof. Muriel Katz

Chaque année, des milliers de personnes migrantes meurent ou disparaissent dans la tentative d’atteindre l’Europe, notamment en Méditerranée. Entre 2014 et 2022, le « Missing Migrant Project » de l’Organisation Internationale pour les Migrations a enregistré le décès de 51.194 personnes en migration. Parmi ces personnes, 29.126 étaient en route vers ou à travers l’Europe : ici, 25.104 personnes ont trouvé le mort dans la Méditerranée. Ces chiffres ne concernent que les corps effectivement retrouvés, alors qu’il est impossible de savoir combien de personnes migrantes disparaissent hors des registres.

Nous nous intéressons à ces corps sans nom en tant que présences spectrales (Didi-Huberman et Giannari, 2017) qui s'imposent aux vivants, matérialisant la violence mortifère du régime des frontières, et les mécanismes de déshumanisation qui en découlent (Albahari, 2006 ; Cuttitta, 2015 ; Distretti, 2020 ; Kobelinsky, 2019 ; Barbieri, 2020). En effet, ces dépouilles ne cessent de disparaitre dans une mer Méditerranée qui, plus qu’un cimetière, est désormais devenue un immense territoire d’abandon des restes humains au cannibalisme sauvage, ce qui représente une violation majeure des interdits structurant l’existence de notre espèce (Katz, 2013). Comme plusieurs études en anthropologie l'ont montré, ces corps sans nom font l'objet d'un traitement institutionnel qui relève d’une forme particulièrement cynique de réification, mais ils produisent également des praxis d'accueil et de commémoration, des pratiques marginales et engagées (Mirto, 2018 ; Zagaria, 2019 ; Kobelinsky, 2020).

Mobilisant une approche clinique référée à la psychanalyse, cette étude est consacrée, précisément, aux pratiques de celles et ceux qui s’impliquent dans un travail de trace, dans la tentative de contrer la disparition des victimes de la migration vers l’Europe. Il s’agit de pratiques d'identification, de sépulture et de commémoration des dépouilles des personnes naufragées, disparues entre les flots et réapparues près des côtes de celui qui aurait pu être un pays d’accueil.

Les enjeux de ces pratiques sont différents et complexes, à la fois politiques, historiques, anthropologiques et psychologiques. Somme toute, de telles praxis nous semblent s’inscrire en contre d’une forme d’adaptation à n’importe quoi (Amati-Sas, 1989, 2003) particulièrement insidieuse, qui met à mal la vie psychique des groupes et des institutions, s’engluant dans l’acceptation passive de choix politiques mortifères et déshumanisantes. Est-ce qu’on pourrait penser ces pratiques d'identification, de sépulture et de commémoration comme autant de tentatives de pallier la défaillance des métacadres sociaux (Kaës, 2009, 2012), de faire brèche dans l’indifférence généralisée ? Nous faisons l’hypothèse que ce travail marginal participe à renouer des contrats narcissiques (Aulagnier, 1975 ; Kaës, 2009 ; 2012) dont la mise à mal déshumanise les morts et affecte les vivants et leurs liens. Il nous semble en effet que ces pratiques s’inscrivent dans l’œuvre toujours fragile de la Kulturarbeit (Zaltzman, 2007), dans l’effort de contrer une forme contemporaine de barbarie : l’expulsion hors humanité des victimes des frontières.

Dans notre recherche, il est question d’explorer les motivations conscientes et inconscientes des sujets et des groupes qui s’impliquent dans ces pratiques, les valeurs qu’elles et ils mobilisent, les anti-modèles qu'elles et ils combattent, à partir du récit qu’elles et ils en font. Nous nous intéressons également à la souffrance psychique de ces sujets et de ces groupes, à leurs manières d'y faire face et à la possibilité de coconstruire des dispositifs réflexifs d'étayage.

Après une phase préliminaire d’interviews via Zoom, il s’agira d’aller rencontrer les acteurs de terrain en Italie méridionale, dans les lieux de leurs pratiques, dans le cadre d’entretiens semi-directifs individuels. L’observation ethnographique des lieux de sépulture des victimes des frontières sera également importante, dans notre dispositif de recueil des données. Concernant notre méthodologie d’analyse des données, nous mobiliserons une posture d’écoute et d’élaboration cliniques.

Clémence Bidaud, doctorante

Les « agirs partagés » dans le traitement psychanalytique

Clémence Bidaud, doctorante

Directeur de thèse : Prof. Pascal Roman

Face à la mélancolisation des liens au sein de nos grandes mégalopoles et à l’augmentation des actes de violence, comment la psychiatrie actuelle peut-elle répondre à cette souffrance des sujets, qui peinent souvent à atteindre les portes de nos institutions et de nos cabinets ?

En réponse aux métamorphoses perpétuelles du culturel, la psychanalyse, qui entame son deuxième siècle d’existence, doit redéfinir son vocabulaire et remettre en question ses concepts. De plus, l’évolution des modes d’expression de la subjectivité implique l’ouverture de son cadre pour accueillir en son sein la prévalence actuelle des passages à l’acte, nouveaux porteurs de l’énigme du Sujet.

Pour répondre à ces nouveaux défis de la psychiatrie et de la psychanalyse, l’intervention de crise à domicile semble être une des réponses originales et pertinentes et ouvrirait ainsi des portes tant à la clinique qu’à la recherche psychanalytique.

Dans ce travail de thèse, nous penserons cette pratique hors-les-murs comme un voyage au coeur de l’agir, qui amène le thérapeute à plonger avec le patient dans ce lieu archaïque de la rencontre via les « agirs partagés » et qui nous fera traverser les différentes étapes de la relation à l’autre et de la constitution du sujet.

Nous nous pencherons tout d’abord sur la question de la mise en place d’un dispositif axé sur les ressentis et le perceptif, permettant la création d’un cadre apte à accueillir les agirs bruyants rencontrés lors des interventions de crise à domicile.

Puis dans un second temps, ce dispositif nous amènera à nous questionner sur les agirs résistants au travail d’interprétation de la névrose de transfert dans le cadre classique de psychothérapie en face à face. En séance, lorsque que cette partie archaïque de la personnalité devient trop bruyante, le cadre classique devrait-il être adapté pour en permettre le traitement ?

Il s’agira alors dans ce travail de questionner le dispositif analytique à la lumière des cliniques de l’agir, tant celles extrêmes de la crise que celles plus quotidiennes de l’ambulatoire, afin de voir si les concepts d’ « agir partagé » et d’ « agir de transfert » permettraient au traitement psychanalytique de poursuivre son précieux travail de relance des processus de symbolisation face aux noyaux de souffrance et de répétition logés en chaque sujet.

Corentin Boulay, premier assistant

Adolescence et médiations thérapeutiques par le jeu de rôle

Corentin BOULAY, premier assistant

Directeur de recherche : Prof. Pascal Roman

Cette recherche explore l’intérêt de l’utilisation du Jeu de Rôle sur table dans les psychothérapies d’adolescents. Elle s’inscrit dans le champ d’études visant la compréhension des processus psychothérapeutiques et la modélisation des processus de symbolisation qui émergent dans le cadre des médiations thérapeutiques groupales, reposant sur le jeu et la création.

La recherche s’intéresse au JdR comme vecteur de créativité, de narrativité et de symbolisation, propice au travail thérapeutique auprès d’adolescents et des problématiques narcissiques-identitaires, mais également à l’accompagnement du processus pubertaire. L’enjeu de cette étude est d’observer et modéliser la manière dont les processus représentatifs émergent et sont relancés dans l’interaction entre le sujet et les différentes dimensions qui composent le cadre de la médiation.

Les comportements, associations mimo-gestuo-posturales et verbales des adolescents dans le cadre de l’activité seront explorées à travers leurs manifestations sur les différentes scènes transférentielles que propose la médiation : l’interaction avec le médium, l’interaction avec le groupe, l’interaction avec le thérapeute. Nous nous intéressons également au champ de la narration et au processus de création de récits, à travers le repérage des phénomènes représentatifs dans cette scène spécifique et particulièrement mobilisée par l’activité Jeu de Rôle, qui consiste à jouer à co-créer des histoires interactives en incarnant un personnage fictif.  

 

 

 

Sonia Corré, doctorante

Exploration de la dynamique psychique des adolescents auteurs de violences sexuelles

Sonia Corré, doctorante

Directeur de thèse : Prof. Pascal Roman

S’inscrivant dans une dynamique de recherche-action impulsée dans un service de placement judiciaire, ce travail de thèse portera sur l’exploration des modalités du fonctionnement psychique des adolescents auteurs de violences sexuelles. Il s’agira notamment de préciser les observations cliniques souvent relevées et questionnant une dimension perverse chez ces adolescents, qui pourrait s’entendre sur un registre bien plus infantile.

 Cette recherche s’intéressera également à la réflexion autour d’un dispositif thérapeutique original, constitué d’un maillage d’espaces pluridisciplinaires mis en place sur le service où se déroulera la recherche. L’étude, dans une perspective psychodynamique, des ressorts concourant à rendre cet espace thérapeutique efficient permettra de discuter les qualités du cadre adapté à ces adolescents.

L’approche longitudinale guidera une exploration en appui sur une méthodologie projective en test-retest permettant une discussion sur les évolutions des organisations défensives au décours de la prise en charge. Parallèlement, les observations régulières du processus de subjectivation tel qu’il s’exprime au sein des différents espaces du dispositif thérapeutique permettra de discuter les évolutions, ou non, qui sont observées.

Le format de cette thèse sur articles signe son souhait de transmettre et partager une réflexion autour de l’accompagnement thérapeutique des auteurs de violences sexuelles.

Alexandre Croisier, doctorant

Les enjeux du langage dans une clinique psychanalytique du traumatisme

Alexandre CROISIER, doctorant

Directeur de thèse : Prof. Pascal Roman

Cette thèse a pour objet le concept de trauma en psychanalyse, plus particulièrement le lieu de nouage entre les événements traumatogènes, leur appréhension clinique dans le transfert et les modelages conceptuels qui en découlent dans l’histoire et dans la recherche contemporaine en psychanalyse. Ce lieu de nouage est appréhendé ici de manière critique par la dialectisation des discours psychanalytiques dans leurs valeurs transférentielles, historiques, sociales et politiques dans le contexte européen du XXIème siècle avec les discours philosophiques particuliers de Paul Ricoeur sur l’interprétation en psychanalyse, et sa place dans ce qu’il désigne comme le « grand débat sur le langage », et de Foucault dans sa compréhension des discours psychanalytiques comme étant inscrits dans un dispositif discursif particulier, celui de sexualité (situé initialement dans un contexte européen du XIXème siècle). Ce mode d’appréhension a pour vertu de permettre la mise en tension du concept de traumatisme en psychanalyse par l’interrogation de l’attente transférentielle d’un « dire de soi » du côté des patient.e.s dit.e.s « victimes de traumatisme », et de la recherche archéologique de symboles analysables dans leur histoire, ceux-ci s’apparentant souvent du côté des patient.e.s par l’énonciation d’une demande de tout oublier ou de perdre la mémoire. Cette thèse s’articule donc autour de la question suivante : comment penser les énoncés propres au trauma en psychanalyse dans cet écart entre la demande de tout oublier et l’attente thérapeutique d’un « dire de soi » ?

 

Pierre Didier Nyongo, doctorant

Religion, symbolisation et enveloppe psychique. Permanence du recours au milieu maternant dans la vie psychique

Pierre Didier NYONGO, doctorant

Directeur de thèse : Prof. Pascal Roman

Les changements survenus en Afrique en général et au Cameroun en particulier ont bousculé non seulement l´univers culturel de l´Africain, mais un grand pan de sa dimension psychique. Certaines réalités qui autrefois étaient considérées comme des valeurs, ne le sont plus aujourd´hui. Avec la survenue de la crise économique, certaines réalités sont devenues des valeurs presqu´incontournables. La religion pour beaucoup est une de ces valeurs. On y recourt parfois pour se protéger contre les difficultés de la vie.

L´objectif général est de notre travail est de savoir pourquoi face à la souffrance quantité d´Africains recourent à la religion ? Nous postulons que la religion possède une fonction contenante qui attire les personnes en souffrance. La religion constitue l´un des principaux milieux maternant auquel les Africains ont recours.

L´enveloppe psychique renvoie à  un certain nombre de processus. Il ne s´agit pas d´un objet psychique en soi ou d´une instance particulière. (Ciccone, 2001). Cette fonction contient et transforme. Mellier affirme que : « la construction des enveloppes psychiques s’effectue dans la prime enfance et reste la marque de chaque individu. Ces enveloppes portent la trace des traumatismes précoces et des parties non encore différenciées du sujet » (2018, p. 29-30).

Pour penser la notion d´enveloppe psychique, il faut toujours poser deux entités. La première entité est un sujet marqué par l´incomplétude ou le manque et qui en souffre. Il a besoin d´un  objet  vers lequel il va projeter ses besoins, ces émotions et toutes les tensions qu´il éprouve. L´objet peut transformer ces éprouvés négatifs en des données positives, mieux acceptables et mieux digérables pour le sujet. La transformation des éprouvés négatifs en données positives par le sujet constitue ce qu´on appelle la fonction conteneur de l´objet. Pour Kaës, « la contenance se convertit en fonction conteneur lorsque s’engage un processus de transformation des contenus par la capacité de contenance. (…). La fonction conteneur est aussi une fonction de figuration et de transformation des représentations d’objets et des affects en représentation de mots » (2012, p. 655). L´objet devient pour le sujet, l´objet contenant. L´enveloppe psychique nait de l´intériorisation  de l´objet contenant ou de la fonction contenante de l´objet (Ciccone, 2001). Au début contenant, l´objet, par son intériorisation, devient objet contenu et continue d´exercer sa fonction contenante à partir de l´intérieur de la psyché du sujet. Il peut arriver que l´objet rejette les éprouvés du sujet, c´est-à-dire ne les contienne pas ou les contiennent et les transforme pas bien. Le sujet intériorisera toujours l´objet contenant, mais se construira une enveloppe psychique pathologique. L´objet n´est pas passif dans le processus. Il doit lui-même solliciter le sujet. La contenance est donc un partage d´expérience entre le sujet et l´objet. Les principales qualités de l´objet doivent être l´attention et la pensée. La pensée est la reconnaissance des éprouvés du sujet, leur accueille et leur transformation (Ciccone, 2001).

L´intériorisation de l´objet contenant passe par l´identification projective. Elle consiste « à investir et explorer l´espace mental de l´objet, à y transmettre et déposer les émotions insupportables et à y explorer la vie émotionnelle dans l´espace mental de l´autre » (Ciccone, 2001, p. 410). Le sujet se retirera plus tard en emportant ses éprouvés transformés.

La fonction d´enveloppe psychique implique un travail de symbolisation. Toute expérience laisse dans le psychisme des traces psychiques ou traces mnésiques selon les termes de Freud (1895). Ces traces sont inconscientes. En prolongement de ces travaux, Roussillon (1999) va développer les notions de symbolisation primaire et de symbolisation secondaire. Il va distinguer trois types d´inscriptions psychiques : la trace mnésique perceptive, la trace inconsciente qui est la représentation de la chose et la trace verbale préconsciente qui la représentation de mot. La symbolisation primaire consiste à transformer ces traces psychiques en des choses dans l´inconscient et la symbolisation secondaire consiste à la transformation des choses en mots. Les traces psychiques se trouvent sur la strate primitive et profonde du psychisme. Le sujet a des éprouvés négatifs qu´il ne peut exprimer ; en les accueillant, les contenant, puis en les transformant en données positives pour le sujet, l´objet permet ainsi au sujet de symboliser, c´est-à-dire de transformer les traces mnésiques imprimées dans son psychisme en choses. Si la symbolisation primaire n´a pas lieu, les traces mnésiques de ces éprouvés seront clivés, c´est-à-dire amputés et reviendront sous la forme des hallucinations ou des délires dans des états psychotiques (Roussillon, 2014). La symbolisation secondaire intervient lorsque la représentation de la chose donne lieu à la représentation du mot pour designer la chose.

L´objectif secondaire de notre travail est de penser l´articulation entre la religion et le soin psychique.

La question principale dans ce travail est la suivante : La question principale dans ce travail est la suivante : Comment la pratique religieuse fonctionne-t-elle comme enveloppe psychique dans la vie de personnes en proie aux difficultés de la vie ?

Nous avons formulé trois sous-hypothèses :

-Le premier axe :

La pratique religieuse procure des soins au psychisme humain.

-Le deuxième axe :

La pratique religieuse contribue au processus de symbolisation face à la souffrance.

-Le troisième axe :

La pratique religieuse permet une nouvelle identification du soi face à la souffrance.

La méthode que nous utiliserons pour parvenir à nos fins est l´analyse phénoménologique interprétative (IPA).

 

Marie Saudan, assistante-doctorante

Des engagements radicaux aux conduites addictives : le processus d’idéalisation mortifère à l’origine des manifestations contemporaines du malêtre adolescent

Marie Saudan, assistante-doctorante

Directeur de thèse : Pascal Roman

Face aux éprouvés de stupeur et d’incompréhension que suscitent les départs d’adolescents et de jeunes adultes au djihad, de nombreux domaines de recherche ont souhaité s’intéresser au phénomène actuel de la radicalisation islamiste. Notre projet de recherche qualitative, à mi-chemin entre psychanalyse et sociologie clinique, s’inscrit dans cette même volonté de mise en sens et souhaite à la fois interroger la dimension radicale de différents comportements adolescents, mais aussi mettre en lumière l’implication de la modification des métacadres sociaux sur la santé mentale des adolescents. La finalité de cette recherche est ainsi d’identifier une forme de radicalité adolescente englobant les différentes manifestations adolescentes de notre monde contemporain et d’inscrire les engagements radicaux islamistes au côté des autres problématiques liées au processus d’adolescence.  

Notre hypothèse principale s’articule autour de deux populations distinctes, l’une définie par des adolescents et des jeunes adultes attirés par une idéologie radicale politique, religieuse ou sociale, et l’autre par des sujets présentant des conduites addictives impliquant le corps réel (troubles des conduites alimentaires et toxicomanies) et le corps virtuel (addictions aux jeux vidéo). Nous proposons l’hypothèse selon laquelle ces catégories de comportements peuvent se comprendre toutes deux non seulement au regard de l’absence de cadres contenants dans notre société hypermoderne mais aussi d’une vulnérabilité psychique mise en exergue par la crise d’adolescence. Face à ces menaces, sociétales et pubertaires, nous pensons que des problématiques adolescentes, en apparence distinctes, peuvent se référer à un processus intrapsychique défensif commun que nous proposons de nommer idéalisation mortifère. Ce processus constitue un rempart contre l’effondrement psychique à l’adolescence et consiste en l’adhésion absolue à un objet (une religion, un parti politique, un jeu, une esthétique, une substance) à tel point que l’identité et le sentiment de continuité s’en trouvent tributaires.

La population clinique sera constituée de vingt adolescent.e.s et jeunes adultes volontaires âgé.e.s de 15 à 22 ans (n = 20). Dix participant.e.s composeront la population clinique des engagements radicaux tandis que dix autres formeront la cohorte des problématiques d’addiction. La passation des épreuves projectives (Rorschach et TAT) succédera à un premier entretien de rencontre à visée sociologique. Les données recueillies permettront d’observer cliniquement et de manière comparée le processus d’idéalisation mortifère au sein des deux populations précitées.

Julie Verdel, doctorante

La « médiation Photo-Histoire » : Développement d’une médiation projective photo-narrative dans le bilan psychologique des enfants de 9-11 ans en difficulté scolaire

Julie VERDEL, doctorante

Directeur de thèse : Prof. Pascal Roman

Dans le cadre d’une pratique en psychologie scolaire dans des écoles publiques françaises, il s’agit de développer, mettre à l’épreuve et formaliser une pratique de médiation projective photo-narrative, que nous avons nommée « médiation Photo-Histoire ». Les participants sont des enfants 9 à 11 ans en difficulté scolaire, pour lesquels l’enseignant demande un bilan psychologique afin d’évaluer la nécessité d’une orientation après l’école primaire, de la mise en place d’aménagements, de rééducations (orthophonie, psychomotricité…), et/ou de soin psychologique. Le décalage à la norme du développement des enfants participants est objectivé par des évaluations pédagogiques et cognitives, des bilans de langage et écrit pour certains, et la psychométrie (WISC-V). Le recueil de données d’une durée de 2 ans (juin 2020-juin 2022) a permis de rencontrer une quinzaine de participant.e.s.

Dans notre approche, les difficultés scolaires, les troubles instrumentaux, les dysharmonies développementales seront entendus et écoutés comme symptômes : témoignages et traces des liaisons pulsionnelles et de leurs aléas.

Sur le plan méthodologique, c’est au cours du bilan psychologique qu’est proposée cette médiation, en articulation avec le WISC-V, le dessin du bonhomme et le TAT, dans une démarche précise et identique pour tous les participants. Cette médiation narrative consiste en la création, par l’enfant, d’une histoire qu’il invente et raconte lors du collage de photographies qu’il a choisies en amont selon trois catégories : personnages, lieux, objets/accessoires. La.le psychologue écrit l’histoire racontée par l’enfant au fur et à mesure de la narration et du collage. L’enfant voit ainsi son histoire s’écrire en même temps qu’il la raconte. Le résultat prend une forme de frise narrative sur du papier en rouleau (volumen), comportant les photos collées sur le haut de la feuille par l’enfant et l’histoire écrite sous les photos par le psychologue.  

Cette médiation sollicite l’enfant tant sur le registre de la symbolisation primaire (collage) que secondaire (narration). L’utilisation de la photographie semble être un support à la fois contenant et participant à la liaison pulsionnelle souvent défaillante dans les difficultés à penser. La narrativité sera explorée comme un indicateur de la dynamique psychique de l’enfant. Une étude comparative avec les éléments du TAT permettra de repérer une éventuelle convergence dans les procédés d’élaboration des récits. L’attention conjointe sera également un point d’observation et d’analyse. Nous explorerons ainsi le contenu de cette médiation dans le choix des photos, le contenu de l’histoire et le transfert sur le support, le cadre et le psychologue.

Un groupe témoin permettra de comparer les réalisations des enfants avec/sans difficultés dans les apprentissages.

L’objectif de ce travail de thèse est de formaliser cet outil appelé « médiation Photo-Histoire », afin qu’il puisse trouver une place à part entière dans la pratique clinique avec l’enfant, que ce soit dans le cadre du bilan ou dans une approche psychothérapeutique.

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