A l'occasion de l'ouverture du nouveau Centre de la main qui a eu lieu le 1er décembre 2013, coup de projecteur sur son directeur, le Prof. Wassim Raffoul, et les projets liés à ce nouveau Centre.
Professeur Wassim Raffoul, vous vous êtes spécialisé en chirurgie de la main. Qu'est-ce qui vous a attiré dans cette discipline?
«A la base, je suis arrivé un peu par hasard dans la chirurgie de la main. Dans le cadre de ma spécialisation en chirurgie plastique, j ai eu l'occasion de travailler avec le Professeur Narakas, l'un des pionniers de la chirurgie de la main et des nerfs. De par sa personnalité et ses compétences, j'ai été fasciné par ce qu il faisait et c'est là que j'ai compris toute la complexité mais aussi le grand attrait de cette spécialité.»
Pourquoi dit-on de la chirurgie de la main qu'il s'agit d'une chirurgie complexe?
«Les traumatismes de la main sont très fréquents: 25% des personnes qui consultent aux urgences ont aussi un problème à la main. Ces traumatismes sont toutefois souvent complexes à soigner car ils demandent un niveau de technicité élevé pour les traiter. Nous sommes dans de la microchirurgie, nous devons par exemple suturer des vaisseaux qui ne font même pas 1mm de diamètre avec un fil plus fin qu'un cheveu ! Cela requière énormément de finesse et de minutie. Il y a également de nombreuses pathologies de la main, souvent dues à l'utilisation fréquentes de la main, au sport ou encore au vieillissement de la population qui nécessitent une connaissance très poussée de l'anatomie et de la physiologie de la main. Toutes ces pathologies requièrent une prise en charge multidisciplinaire et coordonnée où, en plus des chirurgiens, les infirmiers, physiothérapeutes et ergothérapeutes jouent un rôle très important. Notre nouveau centre offre justement ces prestations hautement qualifiées et cette prise en charge multidisciplinaire.»
Pourquoi est-il important de toujours consulter un médecin quand nous nous blessons à la main?
«La main, c'est notre outil de travail et social que nous mobilisons constamment. Une blessure mal soignée peut laisser des séquelles à long terme et des problèmes de sensibilité ou encore de mobilité. A titre d'exemple, une plaie de moins d'un centimètre au doigt peut provoquer une lésion au niveau des tendons, des artères ou encore des nerfs qui sont les "éléments nobles" de la main. Il est donc important de consulter un médecin en cas de blessure de la main même bénigne.»
Parallèlement aux activités cliniques et d'enseignement, le Centre de la main a également pour mission de conduire des travaux de recherche universitaires. Sur quels projets travaillez-vous actuellement?
«Deux nouveaux projets ont récemment reçu d'importants financements, l'un par un fond national, l'autre par un fond de la communauté européenne. Le premier mené en collaboration avec le Laboratoire de neuroprothétique de l'EPFL s'intéresse à la régénération nerveuse. Très pointu, il utilise des technologies totalement innovantes qui visent à construire des tubes dans lesquels les nerfs se régénèrent et d'ajouter des cellules souches stimulant leur régénération. L'aboutissement de ce projet serait très positif pour la clinique car même si aujourd'hui au CHUV nous pratiquons d' ores et déjà des greffes de nerfs, il arrive parfois qu'il n y ait pas suffisamment de nerfs à disposition pour réparer la totalité des nerfs lésés.»
Et le deuxième projet?
«Le deuxième projet s'intéresse aux traitements des douleurs fantômes des membres supérieurs. Il vise également à améliorer une main robotisée en permettant de faire ressentir le chaud et le froid à travers les nerfs d'un membre sectionné. Nous avons reçu pour cela un fond européen de 6 millions d'euros! Sur ce projet absolument novateur, nous représentons le CHUV mais aussi l'Université de Lausanne et collaborons avec six grandes institutions universitaires européennes dont l'EPFL.»
L'Office fédéral de la santé publique a reconnu la spécialisation de chirurgie de la main comme une spécialité à part entière depuis le début de l'année 2013. Qu'est-ce que cela signifie concrètement pour ce domaine et pour le CHUV?
«Pendant longtemps la chirurgie de la main était une sous-spécialité de la chirurgie plastique et de la chirurgie orthopédique. La considérer comme une spécialité à part entière est une réelle reconnaissance pour ce type de chirurgie. Cela démontre qu elle mérite une formation aussi importante et poussée que les autres. Pour le Centre de la main, en tant que centre universitaire, nous avons trois missions: soigner les patients, enseigner aux plus jeunes et développer des projets de recherche. En ce sens, nous sommes rattachés au CHUV mais aussi à l'Université de Lausanne, et sommes chargé de former les futurs médecins. Le programme de formation et d'enseignement a donc été remis à jour touchant tous les corps de métiers qui interviennent dans la prise en charge des pathologies de la main.»