Écologie urbaine et transitions

Construire la ville résiliente et habitable

 

La nouvelle écologie urbaine est un des axes fondateurs à l’origine de la réflexion menée à l’Observatoire sur la régulation des transformations urbaines contemporaines et de leurs incidences sociales et écologiques.  À la suite des travaux de Duvigneaud (1978) , de Odum (1971, 1983) et de Goergescu-Roegen (1979), l’idée s’impose que la ville peut être représentée come un système artificiel, biophysique et anthroposocial, spatialement structuré  en de multiples niveaux d’organisation. Dans cette « nouvelle écologie urbaine » la référence aux écosystèmes naturels est une heuristique de l’action qui repose sur le postulat que l’homme est un maillon interne, et non un agent extérieur. La ville est ainsi représentée comme une « seconde nature » et comme un processeur de matière et d’énergie doublement ouvert à son environnement proche ou lointain. N’ayant pas suffisamment de sol organique pour assurer sa reproduction de manière autonome la ville alimente en permanence son métabolisme en amont, par des flux externes puisés dans son environnement. En aval du processus de transformation des ressources la ville rejette ver l’extérieur une partie de ses déchets et de ses émissions polluantes.  Elle reporte ainsi ses flux entropiques dans un environnement plus ou moins large dont la capacité de charge n’est pas sans limites.

 

Comment rendre la ville « supportable » pour la nature et l’environnement supportable pour l’homme ? Telle est la question centrale au cœur des réflexions de l’Observatoire. Nos recherches partent d’un triple constant : 1) les villes sont des écosystèmes imparfaits : les flux internes de matière et d’énergie sont faiblement bouclés entre eux ; 2) L’ordre de la ville se traduit par le désordre de ses enveloppes spatiales : la ville est une réalité translocale qui agit fortement sur l’empreinte écologique et le changement climatique global ; 3) L’urbanisation extensive rend la ville plus inefficace du point de vue des ressources matérielles,  de la qualité des cadres de vie, de son habitabilité.

 

L’approche de la durabilité urbaine rencontre ici la nécessité de mettre en lumière les liens existants entres le métabolisme urbain, les formes environnementales de la ville, les usages des ressources urbaines et la régulation de ces usages par des politiques publiques dans une visée de transition globale vers des villes plus résilientes et plus habitables. La nouvelle écologie urbaine prend ainsi le parti de considérer que les humains sont des facteurs internes aux systèmes naturels, dont l’action peur amplifier mais aussi réguler les flux de matière et d’énergie nécessaires au fonctionnement des villes dans une visée de viabilité et d’habitabilité. Trois axes de recherche sont développés au fil du temps :

 

  1. Réguler le métabolisme urbain : une conversion du regard. Analyser les chances de maîtrise du métabolisme urbain par une « conversion du regard » permettant de passer de l’analyse classique des politiques environnementales de gestion des émissions polluantes et des déchets à une approche ressourcielle, orientée vers une gestion globale et intégrée des ressources naturelles, à l’aide des concepts empruntés d’une part, à l’économie institutionnelle des ressources (analyse des biens et des services écosystémiques et des droits d’usage et de propriété) et d’autre part, à l’analyse des politiques publiques et des règles collectives ayant une incidence sur les comportements des acteurs (Knoepfel, Nahrath ; 2005). L’hypothèse centrale de cette approche est que les villes peuvent concevoir des stratégies adaptatives permettant de retrouver non pas un inconcevable statu quo ante, pré-industriel, mais accéder à un autre pallier de métastabilité écosystémique davantage fondé sur la circularité des flux, la transition vers l’approvisionnement en ressources renouvelables et recyclables, le contrôle des déchets et des émissions polluantes, le renforcement de la résiliences et l’amélioration de l’habitabilité urbaine.
  2. Transitions vers un nouveau régime urbain durable : vers une ville résiliente. Il s’agit d’envisager les solutions pour construire dès maintenant des villes écologiques capables de répondre aux défis posées par le pic pétrolier, de réduire radicalement les besoins en énergies fossiles et de s’adapter aux changements climatiques. Comment transformer les menaces en forces constructrices ? Comment maîtriser les vulnérabilités urbaines, faire avec les risques et assurer la transition vers une ville plus résiliente ? Quelles perspectives d’évolution des outils de planification et de projet urbain ? Les pistes de recherche en matière d’atténuation et d’adaptation sont multiples : réorganisation de l’approvisionnement énergétique, densification intelligente, redistribution des charges spatiales selon le concept de ville polycentrique, mobilités actives, « transit oriented development », architecture bioclimatique, interdépendances des réseaux essentielles, trames verts et bleues, etc.
  3. Formes environnementales, habitabilité et qualité des espaces publics : vers une nouvelle alliance ville-nature

 

Le souci de maîtrise de l’empreinte écologique ne doit pas effacer celui de l’habitabilité des lieux. Les sociétés urbaines influencent la viabilité des écosystèmes et configurent en même temps les formes environnementales de l’habitat et des cadres de vie. Les villes sont à la fois le milieu de l’homme et son artefact. À ce titre, elles abritent une mosaïque de formes environnementales plus ou moins anthropisées, artificialisées et artialisées. Chaque lieu est une certaine proportion de minéral et de végétal, d’air et d’eau, de terre et de ciel. La recherche urbaine vise ici à mettre en évidence les modalités d’hybridation et de cohabitation entre les espaces construits et les éléments de nature par une catégorisation des formes environnementales et de leurs problématiques spécifiques. Cet axe d’investigation cherche aussi à identifier les stratégies et les pratiques en matière d’aménagement capables de transformer la nouvelle alliance ville-nature en projets urbains répondant aux enjeux de la qualité urbaine. C’est l’habitabilité des lieux qui investi du sens dans toutes les variations de la matérialité de l’urbain. Les recherches sur l’habitabilité sont ici fondées sur le postulat que les citadins dans leurs différences peuvent inscrire leurs modes de vie dans des espaces publics accueillants, confortables et attractifs dans lesquels ils peuvent à la fois cohabiter et se reconnaître dans leurs identités multiples.

 

 

 

 

 

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