La tourmaline polychrome

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Pour les minéralogistes, le nom tourmaline, dérivant du cinghalais turamali signifiant « qui attire » en raison de ses propriétés électriques, désigne en réalité un groupe constitué de quinze espèces à part entière. Parmi celles-ci, le schörl noir, l'elbaïte multicolore avec sa splendide variété rose rubellite, la dravite jaune ou verte et la liddicoatite rose à rouge sont les espèces les plus connues.

Les minéraux du groupe de la tourmaline cristallisent dans le système rhomboédrique, les cristaux ayant généralement une forme de prisme strié à section triangulaire. Chimiquement, ce sont des silicates complexes : les atomes d'oxygène, de silicium et de bore constituent une charpente dans laquelle des atomes d'aluminium, de fer, de lithium, de calcium, de sodium, de magnésium, de chrome, de manganèse et de titane viennent s'insérer. Un jeu très subtil de substitution entre ces métaux peut se faire au sein d'un même cristal. Des éléments comme le fer, le chrome, le manganèse et le titane confèrent aux tourmalines des couleurs très intenses et variables. De cette complexité chimique, il résulte que cette gemme peut présenter une multitude de couleurs. Ainsi, un cristal zoné peut avoir une extrémité rose et l'autre bleue. Dans d'autres cas, c'est le coeur et la partie superficielle du cristal qui montrent des teintes différentes. Tout le mystère et la splendeur des tourmalines résident dans leur incroyable complexité chimique. Cette caractéristique fut déjà relevée par le Britannique John Ruskin (1819-1900), critique d'art et d'architecture, passionné de géologie et qui affirma au sujet de ce minéral dans son Ethique de la Poussière : " ... sa composition chimique ressemble plus à l'ordonnance d'un médecin du Moyen Age qu'à la formation d'un respectable minéral. "

Si les minéralogistes définissent douze espèces chimiquement différentes dans le groupe de la tourmaline, les gemmologistes subdivisent la seule espèce elbaïte en cinq variétés de couleur : la rubellite rouge à rose, l'indigolite bleue, la sibérite violacée, la verdelite verte et l'achroïte incolore.

Une des propriétés remarquables des cristaux de tourmaline est de s'électriser sous l'effet de la chaleur, des frottements ou des chocs. De ce fait, il est très difficile de nettoyer une tourmaline poussiéreuse avec un chiffon sec alors qu'il est possible de le faire avec un chiffon humidifié, donc conducteur de l'électricité. Des cristaux naturels de tourmaline furent même utilisés pour évaluer la puissance des tests souterrains d'armes nucléaires : les cristaux de tourmaline produisent une quantité d'électricité proportionnelle à l'onde de choc subie.

Le Brésil est sans aucun doute l'Eldorado pour les chercheurs de tourmaline. Dès le 16e siècle, les Portugais récoltaient des pierres vertes, confondues alors avec de l'émeraude. C'est surtout au 20e siècle que les gisements brésiliens de l'Etat du Minas Gerais devinrent célèbres. De magnifiques tourmalines cuprifères bleues et bleu vert proviennent de l'Etat de Paraíba. L'île de Madagascar est surtout connue pour ses tourmalines polychromes extrêmement spectaculaires en tranches sciées et polies. Aux Etats-Unis, de la belle rubellite rose se récolte dans les pegmatites des environs de San Diego en Californie et de splendides cristaux vert menthe sont extraits de la mine Dunton dans le Maine. Les modestes gisements européens sont d'intérêt scientifique et historique, ils ont donné leurs noms à des tourmalines, ainsi l'elbaïte fut décrite à l'île d'Elbe et la dravite fut découverte dans la Drave en Autriche.

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Université de Lausanne