237 (1993/4) Littératures suisses vues de l'étranger

SOMMAIRE

Manfred GSTEIGER - Avant-propos (p. 1-4)

Wladimir SEDELNIK - La Suisse: plurilinguisme, interlittérarité et conscience nationale. Quelques nouveaux aspects d'un vieux problème d'un point de vue russe (p. 5-14)

Dans la perspective d’une systématisation des structures et des processus littéraires, telle qu’une partie de la critique des anciens pays «socialistes» a essayé de la développer, le cas de la Suisse se révèle en même temps paradigmatique et exceptionnel. Wladimir Sedelnik laisse donc volontairement en suspens la question: faut-il considérer la Suisse comme un modèle ou comme un cas isolé?

Marie-Jeanne HEGER-ETIENVRE - La dimension bâloise de Johann Peter Hebel (p. 15-32)

Les liens subtils qu’entretient avec Bâle le pasteur-écrivain badois Johann Peter Hebel (1760-1826) sont interprétés ici à la lumière de données propres à l’espace culturel transfrontalier dont la ville éponyme de l’actuelle Regio Basiliensis constitue le centre.

Nina PAWLOWA - Über Jacob Burckhardt (p. 33-46)

Cet essai est d’abord une introduction à l’œuvre et à la personnalité du grand historien bâlois, écrite à l’intention des lecteurs russes d’aujourd’hui, c’est-à-dire au lendemain de ce qu’on est convenu d’appeler la fin du système socialiste. A la différence d’une idéologie du progrès, représentée essentiellement par Hegel et Marx, qui est prête à sacrifier le «monde tel qu’il est» à un projet d’avenir, l’auteur met en évidence chez Burckhardt la priorité de l’humain. Cette interrogation actualisante d’une œuvre souvent considérée comme conservatrice, voire pessimiste, pose la philosophie de l’histoire de Burckhardt en véritable alternative à la pensée positiviste et invite le lecteur, qu’il soit russe ou non, à retrouver grâce à elle certaines valeurs fondamentales du libéralisme.

Klaus PEZOLD - Zäsur oder offener Schluss? Eine Nachbemerkung zur Geschichte der deutschsprachigen schweizer Literatur im 20. Jahrhundert (p. 47-58)

Récemment, on a tenté de diviser l’histoire de la littérature en Suisse alémanique du XXe siècle en un certain nombre de périodes. Peut-on affirmer, après avoir jeté un rapide coup d’œil sur les résultats de cette entreprise, que l’année 1989 – qui, pour des raisons pratiques, désigne la «fin des années 80» – indique bel et bien un genre de césure? Même si la disparition de Dürrenmatt et de Frisch ne signifie pas pour autant la «fin» de la littérature suisse, la mort de ces deux grands écrivains pourrait néanmoins entraîner un certain trouble dans le développement de la littérature nationale. Les raisons possibles sont à considérer sur trois niveaux: 1. Le bouleversement de la situation historique dû à l’éclatement des états socialistes et ses conséquences sur la conception de soi et du monde des écrivains. 2. Le changement de la géographie politique dans le monde germanophone et ses aspects culturels. 3. Les différentes prises de position lorsque la question de l’avenir de la Suisse à l’intérieur de l’Europe est à l’ordre du jour (comme nous en avons été témoins lors de la votation concernant l’EEE). Sur la base de ces esquisses d’hypothèses, on pourrait s’attendre à des changements aussi riches de conséquences qu’ils le furent dans les années 60. Nous serions alors en présence d’un temps de pause dans l’histoire de la littérature, sans qu’il y ait nécessairement une rupture ni dans le développement de l’œuvre littéraire des écrivains pris en particulier, ni dans celui de la littérature suisse alémanique en général.

Ilona SIEGEL - Zu einigen Besonderheiten der deutschsprachigen Heimatliteratur der Schweiz um 1900 (p. 59-70)

Après la disparition de Gottfried Keller et avant l’entrée en scène de la «génération Robert Walser», la critique et les études germanistiques soutenaient généralement que l’art et la littérature réaliste traditionnels étaient l’unique héritage de Gotthelf, Keller et Meyer, et la seule forme d’art à la mesure de la population suisse. Ce n’est qu’à partir de 1905 que commence vraiment à se développer un panorama littéraire comme on le rencontrait déjà par exemple en Allemagne vers 1900: c’est-à-dire la coexistence de plusieurs littératures différentes. Voici les caractéristiques essentielles qui différencient la littérature traditionnelle suisse de celle de l’Allemagne: 1. La thématique principale est la représentation du monde rural et des conflits humains, moraux et sociaux qui y règnent. Le monde de la montagne et de la nature ne sont alors qu’une thématique secondaire. 2. Vers 1900, un bon nombre d’éléments, outre le choix du lexique, sont spécifiques à la Suisse; en particulier l’effort d’équilibration entre l’ancien et le nouveau, une réflexion plus subtile et moins idéalisée quant aux évolutions sociales dans le milieu villageois, ainsi qu’une attitude positive face à la technique, l’éducation et à l’intellect. 3. L’antinomie entre la patrie et l’étranger domine sur l’opposition ville/campagne, ainsi que sur le fameux modèle d’assainissement de Ganghofer si répandu. 4. Le programme, initié par le mouvement du "Heimatschutz" (protection du partimoine) du Bernois Otto von Greyerz, ne franchit guère les frontières de la Suisse. 5. Pour terminer, on remarque l’absence des éléments antisémites, racistes et nationalistes – du moins jusqu’à la première guerre mondiale – qui caractérisent une partie de la littérature traditionnelle allemande.

Alexandre STROEV - Henri-Frédéric Amiel et la littérature de son temps (p. 71-84)

Tout en appartenant à la littérature de son temps et au contexte culturel de son pays, la Suisse romande, Henri-Frédéric Amiel, auteur d’avant-garde sans le savoir, anticipe l’écriture de la fin du XXe siècle.

Paul GORCEIX - A propos de la critique d'Albert Béguin: un témoignage (p. 85-94)

Représentant parmi d’autres d’une «école» qui a profondément marqué la critique française, Albert Béguin reste exemplaire dans la mesure où il n’a jamais dissocié l’œuvre littéraire d’une quête métaphysique.

Virginia BACIU - La littérature romande contemporaine en Roumanie (p. 95-102)

Malgré une tradition latine et francophile (sinon francophone) commune, la littérature romande contemporaine n’est traduite en Roumanie qu’à partir des années quatre-vingt, après le rétablissement tardif des contacts culturels roumano-helvétiques, interrompus brutalement en 1945 par l’installation du communisme. Six traductions de littérature romande contemporaine seulement sont publiées en Roumanie jusqu’en 1989: trois anthologies de poésie, un roman, une anthologie de prose et un recueil de nouvelles, mais le nombre des auteurs représentés dépasse la trentaine. Actuellement l’intérêt du public pour la littérature romande, comme pour toutes les littératures francophones européennes, augmente sans cesse, mais l’édition est asphyxiée par le désastre économique et par l’indifférence inadmissible du pouvoir.

Elena SAPRIKINA - Coup d'œil sur la littérature suisse-italienne avant Chiesa (p. 103-110)

Avec des auteurs comme Giampietro Riva, Francesco Soave ou Stefano Franscini, la littérature suisse-italienne affirme son existence et parfois aussi sa spécificité bien avant la fameuse prise de conscience que nous avons l’habitude de lier au nom de Francesco Chiesa.

Marianne DE COULON-BENTAYEB - Note sur le statut de l'écrivain suisse-italien en Italie (p. 111-116)

A travers quelques exemples, nous pouvons constater à quel point le statut de la littérature suisse-italienne est encore de nos jours sujet à discussion en Italie. Extension régionale de la littérature italienne ou littérature à part entière? Doit-elle rendre des comptes à un centre culturel fort? Existe-t-il une littérature italienne ou des littératures italiennes? Ces questions restent apparemment encore ouvertes.

Compte rendu bibliographique

Julia BORNAND - Les Alpes et la Liberté: Ecrivains suisses sur la Suisse [en russe], Moscou, éditions du Progrès, 1992 (p. 117-124)

Etudes de lettres. Table des matières 1993 (p. 125-128)

TOP ^

Suivez nous:  

EDL1993_4.jpg

Disponibilité:

En stock

Prix du volume:

5 CHF

Pour commander:

Partagez: