301 (2016/3) Les voies contemporaines de l'oralité - Edité par Camille Vorger

A l’heure où la littérature s’expose à la faveur de nombreux festivals et où la plupart des auteurs se prêtent volontiers au jeu de la mise en voix, voire de la performance, alors que le slam fête ses 30 ans d’existence dans le monde et connaît désormais un franc succès dans toute la Francophonie, cet ouvrage se propose d’explorer les chemins de l’oralité contemporaine, d’envisager comment l’on passe du livre au live, d’analyser les formes et media empruntés par cette oralité qui s’enrichit au fil d’hybridations et de croisements. Poésie, slam, rap, chanson, théâtre, création radiophonique, conte, nouvelle, BD: autant de voies à découvrir au travers de neuf contributions croisant les points de vue d’universitaires et d’artistes, autant de fils qui se tissent et que nous invitons lectrices et lecteurs à suivre pour mieux appréhender les déclinaisons multiples des littératures orales actuelles.

SOMMAIRE

Ivan BIELINSKY (Ivy) - Nuit et jour de la poésie de bouche à oreille (p. 7-12)

Camille VORGER - Mot d’en-voix (p. 13-18)

Camille VORGER - De slam en chanson. Entretien avec Frédéric Nevchehirlian (p. 19-36)

Frédéric Nevchehirlian, ex-membre du groupe «Vibrion», devenu «Nevché», était l’invité du festival genevois «Voix de fête» et il a été notre hôte dans le cadre du séminaire de Master intitulé «Du livre au live: poésie chantée, clamée, slamée» en mars 2015. Nous en avons profité pour lui poser quelques questions sur le parcours emblématique de ce «poète rock», qui figure parmi les pionniers du slam marseillais.

Raphaël BARONI, Gaspard TURIN - Playa Blanca: performance musicale et voix d’auteur (p. 37-56)

Comment le disque de Michel Houellebecq et Bertrand Burgalat, Présence humaine (2000), est-il susceptible d’affecter la manière dont est perçue l’œuvre littéraire de cet écrivain? Nous partirons, pour répondre à cette question, d’une observation moins simple qu’il n’y paraît: nous entendons la «voix» de Michel Houellebecq quand nous le lisons. Il ne s’agira pas uniquement d’affirmer que cette «voix» rend l’auteur responsable de ses écrits, mais aussi qu’elle lui permet d’habiter son texte, de manière quasi charnelle, les dimensions sensibles et éthique nous apparaissant intimement liées. Nous verrons que cette perception imprime à la lecture de Houellebecq une «présence humaine» particulière, alors même que la réception médiatique des romans aura pu nous faire douter de cette présence. En somme, si Houellebecq a pu se montrer pris au piège de sa surmédiatisation, il est aussi capable d’en faire un usage maîtrisé afin de présenter un autre visage, plus subtil, à ses lecteurs.

Denis SAINT-AMAND - «Morts, avec supplément frites». Invectif et logique conflictuelle dans le champ du rap français (p. 57-72)

Lorgnant vers le modèle américain, le milieu du rap français ne se fonde pas sur l’opposition est/ouest qui a dynamisé le champ étatsunien durant les années 1990. Comment en vient-il à développer une logique conflictuelle similaire? Celle-ci n’est-elle pas l’un des constituants majeurs d’une illusio spécifique? Comment se manifeste-t-elle dans les discours des acteurs? Le présent article cherche à la fois à cerner les rouages d’un état du champ et à mesurer comment celui-ci infléchit une poétique de l’invectif.

Marie-Hélène LAROCHELLE - Le «pendule vernaculaire» ou faire parler Arvida (p. 73-86)

Notre article propose d’interroger la représentation de la langue orale québécoise dans le recueil de nouvelles Arvida (Boréal compact, 2014/Quartanier, 2011) de Samuel Archibald. Chargée d’émotion, et porteuse d’une mémoire spécifique, la voix de Samuel Archibald est aujourd’hui considérée comme l’une des plus solides dans la littérature québécoise contemporaine. La présente étude se veut originale dans sa forme puisqu’elle fera directement dialoguer le critique avec l’écrivain, qui a eu la générosité de répondre à nos questions afin d’éclairer certains aspects de son écriture. Ces fragments servent ensuite de tremplins pour produire une analyse de l’oralité dans l’écriture des récits qui composent le recueil Arvida.

Martine HENNARD DUTHEIL DE LA ROCHÈRE - «La magie des voix dans la nuit»: «transcréation» des contes de Perrault chez Angela Carter (p. 87-108)

Cet article propose une lecture comparative des enjeux de l’oralité dans les contes de Perrault et leurs «reformulations» radiophoniques par Angela Carter (1940-1992) dans le but d’éclairer la démarche de «transcréation» propre à l’auteure féministe britannique qui endosse avec humour le rôle d’une nouvelle «ma mère l’Oye». A partir de sa traduction des contes de Perrault pour les enfants dans The Fairy Tales of Charles Perrault (1977), Carter a exploré la textualité et l’intertextualité des contes dans The Bloody Chamber (1979), un recueil de réécritures destinées à des lecteurs adultes. En contrepoint de ces nouvelles en prose, elle a mis en évidence la dimension orale des contes pour la radio, puis leur dimension visuelle au cinéma. Chez Carter, le conte devient un objet d’expérimentation poétique, générique et médiatique au service de l’émancipation des femmes et de leur contribution à l’histoire culturelle. L’exemple développé ici est celui de Vampirella (1976), un «radio play» qui inspirera aussi à l’auteure une nouvelle intitulée «The Lady of the House of Love». Vampirella revisite «La Belle au Bois dormant» sur le mode gothico-parodique afin de recréer pour ses auditeurs l’expérience archaïque du conte raconté au coin du feu et «la magie des voix dans la nuit».

Danielle CHAPERON - Au royaume des sourds... Esquisse d’une histoire des points d’écoute au théâtre (p. 109-128)

L’article s’inscrit dans la périphérie des Sounds Studies développées depuis le début du XXIe siècle. Il prend en compte non seulement le spectacle comme phénomène audible, mais également l’imaginaire du son mis en œuvre dans les textes dramatiques. Ainsi les personnages classiques semblent-ils entendre autre chose que les lecteurs/spectateurs. La conscience d’un tel écart est à la fois centrale et problématique dans le cadre de l’esthétique classique; elle aboutit à une forme particulière de refoulement de l’oralité et de l’univers sonore en général dont les réformes dramatiques et théâtrales qui suivront ne viendront pas à bout aisément. L’analyse de Toi partout, un spectacle de Denis Maillefer, sur des textes de Charles Ferdinand Ramuz, permet d’aborder la situation actuelle par un exemple.

Camille VORGER - Vers un théâtre graphique. Les jeux de l’amour et du football dans les BD de François Bégaudeau (p. 129-152)

Dans cet article, notre propos est d’étudier deux BD de l’auteur contemporain François Bégaudeau en mettant en lumière la théâtralité qui leur est inhérente. Nous parlons en ce sens de «théâtre graphique» comme pendant de l’appellation «roman graphique». Notre approche se veut originale en ce qu’elle rapproche la BD du genre dramatique alors que la plupart des études mettent en relation le 9e art avec le 7e art. Dans cette perspective, nous analysons de nombreuses cases et planches des deux BD constituant notre corpus, en étayant notre propos d’un entretien avec leur scénariste et d’extraits du tapuscrit qu’il nous a transmis.

Jérôme MEIZOZ, Camille VORGER - Ping Pong. Littérature à l’état oral: présence, corps, posture. Oralité de la littérature: performance, physicalité, vocature (p. 153-168)

Dans ce texte conclusif à quatre mains, Jérôme Meizoz et Camille Vorger se proposent de saisir les mots-balles au bond, pour mieux approfondir la réflexion autour des nouvelles formes que revêt l’oralité contemporaine, en écho à des pratiques qui ont traversé (et rebondi dans) l’histoire de la littérature orale.

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ISBN 978-2-940331-49-9

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