Statistique sur la protection de l’enfance, Société suisse de pédiatrie (2009-2022)

Le Groupe de travail pour la protection de l’enfant de la Société suisse de pédiatrie (SSP) recense, depuis plus de dix années consécutives, tous les enfants et adolescent·e·s qui ont été pris en charge ou traités dans une clinique pédiatrique suisse pour une forme de maltraitance (présumée).

Les données collectées concernent le sexe et l’âge des jeunes victimes, la certitude du diagnostic, le lien entre la victime et l’auteur, l’âge et le sexe de l’auteur, ainsi que les mesures tutélaires et pénales prises par les équipes hospitalières.

En 2022, 20 cliniques ou départements pédiatriques ont participé au recensement. Elles ont enregistré 1889 cas d’enfants maltraités répondant aux critères d’inclusion. Par rapport à l’année précédente, cela représente une nette augmentation de 14% des enfants et adolescent·e·s recensé·e·s pour cause de maltraitance. « Au fil des années, on constate une augmentation constante du nombre de cas. Ces données ne permettent toutefois pas de déterminer de manière significative s’il s’agit d’une augmentation réelle de l’incidence de la maltraitance ou si davantage d’enfants et d’adolescent·e·s s’adressent aux groupes de protection de l’enfance en raison d’une sensibilisation accrue de la population ».

Comme pour les années précédentes, il apparaît que les filles sont plus souvent enregistrées pour (suspicion de) maltraitance que les garçons (56% contre 44%). Les garçons sont plus maltraités physiquement (53.2%, contre 46.8% chez les filles), alors que les victimes d’abus sexuels sont en grande majorité des filles (83.6% contre 16.4% de garçons). Parmi ces données, près de la moitié des cas (44.8%) concernaient des enfants de moins de 6 ans.

Dans 75.3% des cas, l’auteur·e fait partie de la famille de l’enfant, et dans 14.1%, il ou elle est connu·e de l’enfant. Aucun changement n’a été constaté en ce qui concerne le sexe des auteur·e·s de maltraitance : dans 36.5% des cas, l’auteur est un homme, dans 23.3% des cas il s’agit d’une femme, et dans 32.3% des cas les enfants et adolescent·e·s sont confronté·e·s à des hommes et des femmes agissant ensemble.

Evolution des statistiques du Groupe de protection de l’enfance de la SSP, 2010-2022

 

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Nb de cliniques participantes

na

na

18

18

21

20

21

20

20

21

21

20

20

Nb de cas recensés

923

1180

1136

1292

1405

1388

1575

1730

1502

1568

1590

1656

1889

 

 

Formes de maltraitance

 

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Maltraitance physique

29.4%

29.5%

29%

27.2%

(n=351)

28.2%

(n=396)

28.3%

(n=393)

23.3%

(n=367)

26.2%

(n=453)

29%

(n=436

31%

(n=486)

26.7%

(n=584)

29.7%

(n=492)

28.3%

(n=534)

Maltraitance psychique

13.3%

17.1%

23.1%

25%

(n=323)

27%

(n=379)

31.1%

(n=432)

36.9%

(n=581)

19.5%

(n=337)

23.6%

(n=354)

20.5%

(n=321)

19.9%

(n=317)

23.7%

(n=392)

26.8%

(n=506)

Négligence

31.5%

28.4%

26.2%

25%

(n=323)

21.9%

(n=307)

20%

(n=277)

20.3%

(n=319)

38.3%

(n=663)

27%

(n=405

30%

(n=470)

26.9%

(n=427)

29.3%

(n=485)

30.1%

(n=568)

Abus sexuels

25.2%

24.7%

21.4%

21.7%

(n=281)

22.7%

(n=319)

19.9%

(n=276)

19.4%

(n=306)

15.7%

(n=271)

19.8%

(n=297)

17.8%

(n=279)

16.2%

(n=259)

16.4%

(n=272)

14.2%

(n=269)

Münchhausen par procuration

0.6%

0.4%

0.4%

1.1%

(n=14)

0.3%

(n=4)

0.7%

(n=10)

0.1%

(n=2)

0.3%

(n=6)

0.7%

(n=10)

0.8%

(n=12)

0.3%

(n=5)

0.9%

(n=15)

0.6%

(n=12)

 

 

 

L’évolution la plus spectaculaire concerne la part de maltraitances psychologiques, qui a doublé entre 2010 et 2022. La proportion d’abus sexuels a quant à elle diminué durant cette période, diminution à prendre avec précaution car rappelons la complexité de détection inhérente aux cas particuliers des abus sexuels. Les mauvais traitements physiques, qui sont historiquement surtout détectés dans ces milieux médicaux, restent proportionnellement stables au fil des années.

Ne disposant pas du détail du nombre de cas pour les quatre premières années et de maigres informations sur la méthodologie utilisée pour produire ces statistiques, il est toutefois difficile de savoir si ces tendances dénotent d’une réelle évolution, et à quel point d’autres facteurs entrent en jeu.

Par exemple, le développement relativement récent de CAN Teams dans les grands hôpitaux, chargés de soutenir les équipes médicales et soignantes dans la détection et le signalement des maltraitances infantiles, jouent certainement un rôle important dans cette augmentation. L’affinement des sensibilités pour les maltraitances de type psychologique a certainement aussi eu un impact notable. Il se peut en outre que certains sévices qui, auparavant étaient classifiés comme des négligences ou voire des violences sexuelles, soient dorénavant plutôt considérés comme des maltraitances psychologiques.

Sources :

Suivez nous:  
Partagez: