229 (1991/4) Relectures de la rhétorique

SOMMAIRE

Jean-Michel ADAM et Claude CALAME - Avant-propos. Relectures de la rhétorique (p. 1-2)

Claude CALAME - Quand dire c’est faire voir: l’évidence dans la rhétorique antique (p. 3-22)

Préoccupée par le «comment dire», la critique littéraire antique se situe entre poétique et rhétorique. Si elle rejoint parfois la nôtre dans son aspect descriptif et classificateur, c'est pour mieux formuler les règles de la bonne diction. Parmi les concepts de portée normative qu'elle a élaborés, celui de l'évidence prend peu à peu une place essentielle dans une conception générale de la fonction de l'œuvre de littérature: il s'agit de transformer l'auditeur/lecteur en spectateur. Bien dire revient donc souvent à faire voir.

Laurent PERRIN - La vérité dans l’exagération. Comment les rhétoriciens voyaient les dessous de l’hyperbole (p. 23-44)

A parcourir la tradition rhétorique, on découvre bien entendu que toute exagération n'est pas une hyperbole, mais surtout que toute hyperbole peut être jugée malheureuse, et s'expose de ce fait à n'être perçue que comme une vulgaire exagération. Ce que nous apprennent les nombreux théoriciens, rhéteurs ou orateurs consultés, ce dont attestent également certains exemples, c'est que l'hyperbole est certes fondée sur une exagération reconnue comme intentionnelle et présentée comme telle, mais que celle-ci doit être également ressentie comme légitime par l'interprète. Pour faire le bonheur d'une hyperbole, l'exagération doit être perçue comme le meilleur moyen dont le locuteur dispose pour ne pas déformer l'état de chose qu'il cherche à représenter.

Marc BONHOMME - Rhétorique ludique et métonymie chez Queneau (p. 45-66)

On présente généralement la métonymie comme une figure référentielle et plus ou moins utilitaire en ce qu'elle engendre, grâce à ses décalages par contiguïté, des saisies spécifiques et par là pertinentes sur le monde. Cet article voudrait montrer un fonctionnement méconnu de la métonymie: son pouvoir de jouer sur le langage, avec le cas exemplaire de Queneau. Constituant l'un des principes rhétoriques de cet écrivain, non seulement la métonymie participe à la structuration et à la cohérence globale de son écriture, mais encore elle lui permet des manipulations hardies et autonomes dans la fermeture de ses œuvres. Manipulations tantôt de variations isotopiques, tantôt de remotivations tropiques.

Marie-Jeanne BOREL - Note sur le raisonnement et ses types (p. 67-86)

La pratique et l'étude du raisonnement ne concerne pas que la rhétorique. Un raisonnement est, certes, en général un texte, mais sa lecture fait appel à des connaissances logiques. Or la distinction, indispensable d'un point de vue critique, entre un discours inférentiel «valide» et un «sophisme» ne fait appel à des connaissances seulement logiques (ou formelles) que pour certains types de raisonnements. Pour l'étude (la typologie, la modélisation et l'évaluation) des autres types (un thème important aujourd'hui en sciences cognitives), d'autres paramètres sont nécessaires. La conception aristotélicienne du raisonnement est à relire dans cette optique, vu la valeur heuristique de sa théorie unifiée de l'argumentation et de la typologie des raisonnements qui en découle. Didactiquement présentées, on les fera suivre de quelques propositions actuelles pour la description et la comparaison des raisonnements. En logique naturelle, on peut ne pas être «formel» sans être «sophiste» pour autant!

Marc SCHOENI - Etude rhétorique du Nouveau Testament: réflexions sur le genre épidictique (p. 87-112)

Je propose de définir la rhétorique comme une méta-théorie de la dimension pragmatique de tout discours. La critique rhétorique applique des modèles anciens et modernes, pour saisir les stratégies mises en œuvre dans le discours. Parmi les catégories traditionnelles, celle des genres rhétoriques me semble opératoire, à condition d'en saisir le caractère fonctionnel et de postuler une bipartition entre l'agonistique (judiciaire et délibératif) et l'épidictique (présent de l'énonciation, communion de valeurs). La lettre de Paul aux Romains se révèle comme un discours en tension, qui dérive de l'épidictique vers l'agonistique; cette tension même aide à comprendre le paradoxe de l'épidictique, à la fois présence du Logos et échec de cette présence.

Françoise REVAZ - Rhétorique du récit. Un débat narratologique toujours actuel: Marmontel contre Le Bossu (p. 113-132)

Le but de cet article est double; d'une part, rendre accessible de larges extraits de deux textes importants: le Traité du poème épique du Père Le Bossu (1675) et les Eléments de littérature de Marmontel (1787), d'autre part, rendre compte des divergences d'opinion entre Marmontel et Le Bossu autour de l'interprétation du poème épique et de son mode de fabrication. A l'occasion, nous établirons quelques liens en amont (Aristote) et en aval (narratologie contemporaine) en montrant à quel point la poétique du Père Le Bossu – encensée par les lettrés du XVIIe siècle, puis totalement négligée par la postérité – n'est pas dépourvue d'une certaine actualité.

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