288 (2011/1-2) Theatra et spectacula. Les grands monuments des jeux dans l'Antiquité - Edité par Michel E. Fuchs et Benoît Dubosson

Les grands édifices des jeux – théâtres, amphithéâtres et cirques – comptent parmi les monuments les plus familiers du paysage archéologique. Pourtant, en dépit d’une silhouette si caractéristique et d’une vocation explicite, ces grands monuments ne cessent de susciter interrogations et débats. En témoignent les travaux conduits ces dernières années par les chercheurs suisses sur les théâtres et amphithéâtres d’Avenches et d’Augst, ainsi que sur les théâtres de Lausanne et d’Alésia. La confrontation de ces recherches avec celles menées en France, au Luxembourg, en Grèce et en Libye était l’occasion d’une mise au point fructueuse concrétisée par une table ronde tenue à l’Université de Lausanne les 22 et 23 mai 2008. L’origine et le sens de ces édifices, leur histoire et leur évolution architecturale propre, les différents types d’usage qu’ils autorisaient, le rôle politique et social qu’ils jouaient, sont autant de problématiques auxquelles ce volume collectif, fort de quinze contributions variées et inédites, tente d’apporter un éclairage nouveau.

SOMMAIRE

Jean-Charles MORETTI - Avant-Propos (p. 7-14)

Anne-Françoise JACCOTTET - Le théâtre à Athènes: chronique d’une invention
(p. 15-28)

Les premières structures «théâtrales» à Athènes réservent quelques surprises et soulèvent des questions quant à l’essence du théâtre et sa perception archéologique et architecturale. Les premières orchestra, aires trapézoïdales et non circulaires, sont le coeur véritable du théâtre antique; les gradins, rectilignes, ne sont que des structures secondaires, d’ailleurs souvent éphémères. Ces constatations relativisent notre perception moderne des théâtres antiques, que l’on appréhende avant tout par les gradins, semi-circulaires qui plus est. Comment reconnaître archéologiquement une structure, comme l’orchestra, qui se définit comme un vide architectural? Qu’est-ce qu’un théâtre en fin de compte?

François ESCHBACH, Sébastien FREUDIGER, François MEYLAN - Recherches en cours sur le théâtre d’Alésia: bilan préliminaire (2004-2008) (p. 29-46)

Plus d’un siècle après sa redécouverte, le théâtre d’Alésia a fait l’objet d’une fouille programmée de 2004 à 2008. Ces nouvelles recherches ont été l’occasion de reprendre l’abondante documentation accumulée lors des campagnes précédentes et de vérifier ou de préciser de nombreux points. C’est ainsi que trois états de fonctionnement ont été définis et que l’étude des occupations antérieures à la construction a permis de proposer des hypothèses relatives à l’existence de lieux de réunion ayant précédé le monument actuel. Une synthèse des éléments connus, complétée des nombreux apports issus des dernières fouilles, sera proposée dans la publication du monument. Le présent article en aborde succinctement les grandes lignes. 

Séverine BLIN, Jean-Yves MARC - Le théâtre de Mandeure: restitution, fonction, datation (p. 47-72)

La reprise des recherches au théâtre de Mandeure a permis d’en modifier de manière substantielle le plan et l’histoire. Sous le gigantesque théâtre actuellement visible, dont le plan et l’apparat monumental apparaissent de plus en plus comme très «canoniques», on a pu mettre au jour les vestiges d’au moins deux édifices de spectacle, dont le plus ancien aurait pu être équipé d’un dispositif scénique très différent d’une orchestra. Mais nous sommes encore loin de restituer, comme à Augst, trois phases claires et bien datées. Nous devrons poursuivre nos recherches en tenant également compte du renouvellement complet de nos connaissances sur le sanctuaire dans lequel s’insère dès l’origine l’édifice de spectacle.

Pierre ANDRÉ - Le théâtre proto-augustéen d’Alba et les origines du «théâtre gallo-romain» (p. 73-96)

Le théâtre d’Alba en Gaule Narbonnaise est situé en limite orientale de la ville, à 150 m des aires à portiques A et B et à 80 m du forum dont il est séparé par un îlot d’habitats. Il est desservi par deux voies et par une aire de circulation située à l’ouest. Son orientation est différente de celle du reste de la ville, mais il est intégré à la trame urbaine dont il occupe deux îlots. On distingue trois états. Le premier apparaît vers 20 av. J.-C. et il sera oblitéré vers 15 apr. J.-C. pour faire place à un théâtre à mur de scène latin qui sera profondément rénové au second siècle. Façade de la capitale des Helviens, il s’impose comme un théâtre de la «transculture» à l’origine de la colonie de droit latin.

François ESCHBACH - Le théâtre antique de Lousonna-Vidy (p. 97-118)

La découverte inattendue du théâtre gallo-romain de Lousonna-Vidy a mis en évidence des particularités notables, soulignant tout son intérêt. Elles permettent de soulever nombre de problématiques nouvelles comme l’influence d’une forme de monument importée sur la tradition locale du spectacle. C’est également l’occasion d’évoquer des thèmes non résolus de façon satisfaisante: la typologie des théâtres, les liens entre la forme du monument et les spectacles qui peuvent y être présentés. Abordés ici superficiellement, ils stimulent la poursuite de l’étude sur les monuments de spectacles.

Véronique BRUNET-GASTON - Décor baroque ou perspective illusoire: le complexe «théâtre et temple» de Genainville (Val d’Oise) (p. 119-128)

L’agglomération antique de Genainville «les Vaux de la Celle» est située dans le Vexin français. Elle comprend un théâtre gallo-romain ainsi qu’un temple à deux cellae accolées dédiées à Mercure et à Rosmerta, auquel est associé un nymphée. Les fouilles ont livré une collection lapidaire particulièrement riche : les blocs architecturaux conservés permettent de restituer pour le temple un décor très chargé, typique de l’horror vacui de l’art des Sévères. Nous évoquerons les rapports existants entre le théâtre et le temple de Genainville: leur implantation est-elle uniquement due aux contraintes topographiques ou y a-t-il volonté de créer un dialogue entre ces deux édifices?

Peter HENRICH - Das gallorömische Theater von Dalheim (Grossherzogtum Luxemburg) (p. 129-152)

Bei den Grabungen im gallorömischen Theater von Dalheim konnten neben zwei aufeinander folgenden hölzernen Sitzbankkonstruktionen in der gesamten cavea das Einbringen von Sitzreihen aus Kalkstein sowie einer zusätzlichen Sitzreihe aus
Sandstein in der orchestra dokumentiert werden. Im Rahmen des Umbaus der Sitzreihen wurde die cavea-Mauer bis auf das Fundamentniveau abgerissen. Beim anschließenden Wiederaufbau verstärkte man zusätzlich die Ecken des Theaters und mauerte die äußeren Apsiden zu. Diese Umbauten sind als eine präventive Maßnahme und nicht als Reparatur bzw. als Reaktion auf bereits aufgetretene Schäden im Mauerwerk zu werten. Die steinernen Sitze in den ersten beiden Reihen mit Rücken- und auch Armlehnen sind als deutliche Hinweise auf die Prohedrie in einem gallorömischen Theater zu deuten. Die Trittstufen auf die Bühne, die seitlichen Eingänge neben dem Bühnengebäude sowie die Altäre in der orchestra liefern wichtige Hinweise zur Funktion der gallorömischen Theater. Die Grabungen haben eine Nutzung des Geländes vor dem Theaterbau im ersten Viertel des 2. Jahrhunderts als Steinbruch belegt. Außerdem wurde ein dort stehendes Gebäude beim Bau des Theaters abgerissen. Nach den Germaneneinfällen des 3. Jahrhunderts wird ein Teil der Sitzsteine für den Bau eines Burgus genutzt und das Theater verliert seine ursprüngliche Funktion. Eine funktional bislang nicht näher bestimmbare Nutzung ist bis an das Ende des 4. Jahrhunderts aufgrund von Kleinfunden belegt.

Patrick MICHEL - Le théâtre de Babylone: nouveauté urbaine et néologisme en Mésopotamie (p. 153-170)

Même au moment de la plus forte intrusion de l’hellénisme dans l’empire séleucide, l’architecture religieuse conserve un puissant parfum local. C’est dans d’autres domaines de l’urbanisme que s’exprimera l’identité des Séleucides; à Babylone, cela se fera avec la construction d’une palestre et d’un théâtre. On a souvent opposé la ville de Babylone à celle d’Uruk, imaginant que la présence d’un théâtre dans la première faisait d’elle une polis, tandis que la seconde était une ville traditionnellement babylonienne. Une étude de la documentation épigraphique et de quelques éléments de l’urbanisme de Babylone nous permettra de mieux cerner l’identité grecque de la ville. L’apparition d’un théâtre introduira également cet élément dans les textes. Un idéogramme, véritable néologisme, sera créé afin de désigner ce nouveau bâtiment, étranger à la tradition mésopotamienne.

Adeline PICHOT - Théâtres et amphithéâtres: outils de romanisation en Maurétanie? (p. 171-192)

Les théâtres et les amphithéâtres faisaient partie de la parure monumentale des grandes villes des Maurétanies césarienne et tingitane. Avec leur architecture spécifique et leurs spectacles, ils permettaient d’assimiler la population à la culture romaine et représentaient la puissance impériale. Tous les habitants s’y retrouvaient pour se détendre et participer au culte rendu aux dieux romains et à l’empereur.

Françoise DUMASY - Théâtres et amphithéâtres dans les cités de Gaule romaine: fonctions et répartition (p. 193-222)

On rappellera d’abord la fonction religieuse des théâtres et des amphithéâtres qui se traduit, en Gaule, par des formules spatiales qui mettent en valeur les liens de ces édifices avec les sanctuaires; on explorera en particulier les ressources des compositions sacrées et des compositions urbaines. On insistera ensuite sur leur fonction sociopolitique, la place du calendrier des jeux dans la vie de la cité et le rôle qu’y jouent les magistrats, ainsi que sur la distribution hiérarchisée du public dans la cavea. La carte de localisation de ces édifices dans le cadre des cités soulignera les différences entre Narbonnaise et Trois Gaules invitant à réfléchir aux modalités d’intégration des sanctuaires et des agglomérations dans le réseau religieux des grandes cités de Gaule centrale et septentrionale. On soulignera enfin la fonction ludique de tous les théâtres, même des plus petits d’entre eux.

Vincenzo MUTARELLI - Le théâtre romain de Lillebonne: étude des sources et nouvelle campagne de fouilles (p. 223-262)

Le théâtre romain de Lillebonne a été identifié et publié en 1764 par le comte de Caylus. Redécouvert par François Rever en 1812, il est acquis par le Conseil général de la Seine-Maritime en 1818. Ses structures, constituées de substructions concentriques et radiales, sont dégagées entre 1822 et 1840, date à laquelle l’édifice est inscrit à l’inventaire des Monuments historiques. Après une période d’abandon, des fouilles complémentaires ont lieu de 1908 à 1915, puis de 1935 à 1939. Le théâtre présente la particularité d’associer une arène et un bâtiment de scène de grandes dimensions. Jusqu’à aujourd’hui, les trois époques de construction identifiées dans ses structures n’avaient jamais pu être datées. La dernière campagne de fouilles de 2007-2009 dans la partie est permet de comprendre l’évolution de l’édifice dans ses deux derniers états et de dater leur construction, ainsi que l’abandon du monument de spectacle et sa transformation en forteresse.

Thomas HUFSCHMID - Funktionale Gesichtspunkte des Theaters und des Amphitheaters im architektonischen, sozialen und politischen Kontext (p. 263-292)

In die Errichtung der römischen Theaterbauten und die Durchführung der darin stattfindenden Spiele wurden oft gewaltige finanzielle Mittel investiert. Dies zeigt, dass die Veranstaltungen in den Theatern und Amphitheatern nicht allein als Unterhaltung der Volksmassen dienten, sondern auch Mittel der politischen Interaktion waren und eine wichtige Grundlage der gesellschaftlichen, politischen und religiösen Propaganda darstellten. Mittels einer potenten Bildsprache wurde soziale Ordnung visualisiert, kulturelle Zusammengehörigkeit demonstriert und imperiale Macht legitimiert. Die rituelle Zelebrierung des Sieges unterstrich zudem den hegemonialen Machtanspruch Roms. Als Rahmen für diese Inszenierungen dienten die Theaterbauten mit ihrer funktional durchdachten Architektur und ihren technischen Einrichtungen.

Philippe BRIDEL - L’amphithéâtre d’Avenches: originalité de quelques aspects architecturaux et fonctionnels (p. 293-306)

Revenant sur un monument qu’il a récemment publié, l’auteur présente quelques particularités de son dispositif architectural, en tentant de leur trouver une interprétation fonctionnelle. La restitution proposée pour les deux états de l’édifice atteste une constance certaine dans l’organisation des circulations autour de l’arène comme dans la cavea. Elle révèle cependant une évolution notable de l’aspect des façades et des accès. Partant d’une simplicité purement fonctionnelle, on aboutit à une monumentalisation qui recourt aux ordres d’applique ou évoque les arcs de triomphe. Couronnant la capitale des Helvètes, l’amphithéâtre s’affirme comme le lieu par excellence des manifestations publiques et populaires en l’honneur de l’empereur.

Jean-Claude GOLVIN - Comment expliquer la forme non elliptique de l’amphithéâtre de Leptis Magna (Al Khums/Lybie)? (p. 307-324)

La forme générale de l’amphithéâtre de Leptis Magna, monument très bien conservé et daté avec précision, n’est pas elliptique et aucune explication n’a été donnée jusqu’à présent de cette situation particulière. Pourtant le monument, entièrement creusé dans le roc, aurait pu posséder la forme elliptique caractéristique de ce type d’édifice, comme c’est le cas pour les amphithéâtres de Cagliari ou de Syracuse. Nous avons émis l’hypothèse que la volonté manifeste de concevoir un monument dont le plan rappelle celui de deux théâtres accolés, plan qui ne se rencontre plus par la suite, devait être liée aux spectacles particuliers qui se déroulèrent sous le règne de Néron.

Jean-Paul THUILLIER - Vingt ans au cirque : des «Roman circuses» au «cirque romain» (p. 325-340)

Vingt ans après la sortie, en 1986, du livre phare de John Humphrey sur les cirques romains, l’organisation d’un colloque international à Bordeaux a permis de faire le point sur toutes les nouveautés concernant cet édifice de spectacle aux dimensions impressionnantes. De l’ouvrage publié en 2008 et qui réunit beaucoup d’articles portant sur les spectacles eux-mêmes, sur leur organisation et leur réception, ne sont examinées ici que les études proprement archéologiques: mais il suffira de mentionner la découverte récente d’un cirque romain en Angleterre pour apprécier tout l’intérêt de cette première partie.

Michel E. FUCHS - Ecouter, voir: architectures du spectacle antique (p. 341-354)

Annexes (p. 355-356)

Adresses des auteurs (p. 357)

 

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ISBN 978-2-940331-25-3

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